Ghost in translation
Parce que nous ne faisons que passer
Assise dans le métro parisien, je regardais les Ghost in translation aller et venir. Une rame amenant et emportant son lot de passants, d’un côté de la voie, puis de l’autre, rythmait la cadence. Ce chassé-croisé routinier aurait pu être monotone. Pourtant, au contraire, ce flux incessant se renouvelait continuellement. Lorsque tout d’un coup, le mouvement s’est mis à s’étirer, s’effilocher, s’effriter, ne laissant que de vagues traces aériennes en suspension dans l’air. Quelques éléments immobiles soulignent cette impermanence. Et je reste là, sans bouger capturant ces effluves comme ultimes traces du passage d’êtres humains pris dans le ronron de leur quotidien. Et ainsi, les passants, emportés par leur mouvement, devenaient fantômes.
Traces illusoires
Ce sont ces traces teintées d’illusion qui m’intéressent de capturer. Outre l’aspect graphique, l’idée d’une multitude de fantômes en transit m’enthousiasme. Humilité de l’instant dans un monde mégalo, dans un monde où la course prévaut sur le moment présent. Dans chaque lieu se trouve des fantômes qui courent d’un endroit à l’autre sans se poser. Même le temps devient alors sujet de consommation.
Fantômes de nos vies
Par extension, d’une certaine manière, ces traces suggèrent donc l’impermanence de notre existence. Impermanence soutenue par l’immobilité adjacente. Dans cet espace clos qu’est une station de métro se dessinent nos chemins de vie entremêlés, dans l’insouciance de l’instant. Les traces invisibles s’évaporent aussitôt qu’elles apparaissent. Et si nos vies n’avaient pas plus d’incidences que ça ? Et si nous étions conscients de cette minuscule empreinte que nous laissons à titre individuel ? Qui se souviendra ? Qui racontera plus tard que nous avons été là ?